Aimez-vous la poésie française? Connaissez-vous les noms de Rimbaud, Baudelaire ou Hugo? Si vous lisez déjà de la poésie française, ou souhaitez commencer, cela peut être une bonne idée d’apprendre les règles du “e muet”.
Avant de commencer, il est important de savoir ce qu’est un alexandrin. Souvent, la poésie française traditionnelle est composée d’alexandrins. Ce sont des vers (pas des lignes!) de la poésie qui ont douze syllabes.
Maintenant, le “e muet”. On peut trouver le “e muet” à la fin d’un mot comme “tête”, ou “herbe”, et en général on ne le prononce pas, il ne fait pas de son. Quand vous dites “tête”, c’est une seule syllable [tèt]. Mais quand vous lisez de la poésie, vous devez prononcer ce “e” quand il est suivi par une consonne.
Regardez le poème “Le Dormeur du Val” d’Arthur Rimbaud. Comme c’est un poème composé d’alexandrins, chaque vers a douze syllabes. Les “e muets” prononcés sont en gras.
Le Dormeur du Val
C’est un trou de verdure, où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent; où le soleil, de la montagne fière,
Luit: c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme:
Nature, berce-le chaudement: il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Voici une vidéo très utile pour écouter les syllabes.
Et voici les règles de base:
- S’il y a un “e” à la fin du mot et que le mot suivant commence par une consonne, il faut prononcer le “e”. (Par exemple, “mousse de rayons”)
- Quand le “e” est suivi d’un marqueur du pluriel en fin de mot, il doit être prononcé (Par exemple, dans “deux trous rouges au côté droit”, le “s” sert a faire la liaison : rouge s au…)
- On ne prononce jamais le “e muet” à la fin d’un vers même si le vers suivant commence par une consonne (“fière / Luit”).
Si vous voulez, vous pouvez essayer vous-même. Voici un poème de Charles Baudelaire, “Correspondances”. Comme “Le Dormeur du Val”, chaque vers est un alexandrin et doit donc avoir 12 pieds (=syllabes).
Correspondances
La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
II est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.
Et voici la réponse!
Si vous comprenez le “e muet”, vous entendrez mieux la musique de la poésie française. Mais ce ne sont pas que des poètes qui jouent avec le “e muet”. Les chansons françaises ainsi que différents dialectes français l’emploient pour sa musicalité. Si cela vous intéresse, vous pouvez explorer les liens ci-dessous:
https://medium.com/language-lab/merde-uh-the-sound-of-silent-e-a58f12baac87
https://blogs.transparent.com/french/french-pronunciation-basics-part-3/
Bibliographie:
The Cambridge Introduction to French Poetry par Mary Shaw