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La poésie comme outil de protestation: Arthur Rimbaud et Amanda Gorman

 

Le dormeur du val (Arthur Rimbaud)

C’est un trou de verdure, où chante une rivière

Accrochant follement aux herbes des haillons

D’argent; où le soleil, de la montagne fière,

Luit: c’est un petit val qui mousse de rayons.

 

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,

Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

 

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

Sourirait un enfant malade, il fait un somme:

Nature, berce-le chaudement: il a froid.

 

Les parfums ne font pas frissonner sa narine;

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

 

Un Extrait du “The Hill We Climb” (Amanda Gorman)

When day comes we ask ourselves,

where can we find light in this never-ending shade?

The loss we carry,

a sea we must wade

We’ve braved the belly of the beast

We’ve learned that quiet isn’t always peace

And the norms and notions

of what just is

Isn’t always just-ice

And yet the dawn is ours

before we knew it

Somehow we do it

Somehow we’ve weathered and witnessed

a nation that isn’t broken

but simply unfinished

 

       Arthur Rimbaud et Amanda Gorman: ces deux jeunes poètes, séparés par plus d’un siècle, ont manifesté à leur manière contre la violence, l’injustice et la guerre. 

        Les deux poèmes que vous venez de lire ont su toucher leurs contemporains et, pour Rimbaud, des générations d’écoliers ont étudié Le dormeur du val dans les classes, et  l’ont l’utilisé pour discuter des problèmes avec la guerre. On l’entend aussi chanté à la radio: par exemple le chanteur et acteur Serge Reggiani l’accompagne d’une chanson de B. Vian, et plaide contre la guerre et pour l’objection de conscience. Voila cette chanson:

 

         Quant à Amanda Gorman, beaucoup d’Américains aiment le poèmeThe Hill We Climb qu’elle a lu à l’investiture du Président Biden, et dont elle se sert pour discuter des problèmes d’inégalité dans l’État-unis.

         Entre les deux, ces poèmes confirment que la poésie est un moyen de protestation et une arme politique d’une grande efficacité. Une forme courte, des rythmes accrocheurs, et des images frappantes font que les poèmes peuvent facilement partager des idées fortes avec leurs lecteurs. Rimbaud et Gorman connaissent le pouvoir de la poésie, et s’en servent pour sensibiliser leurs lectrices.

         Rimbaud montre les conséquences de la guerre. Cette prise de position était importante à son époque et est encore pertinente  aujourd’hui. Les guerres modernes, comme les guerres en Syrie et en Afghanistan, causent beaucoup de morts, aussi bien dans l’armée que chez les civils,  et de destructions. Les gens ne peuvent plus trouver de la nourriture, il n’y a plus de médecin, et doivent chercher refuge ailleurs.

         Gorman utilise son poème pour protester contre une autre forme la violence- l’inégalité. Elle décrit les Etats-Unis comme une “beast” à cause des formes violentes des inégalités, notamment le racisme, qui existent dans ce pays. La brutalité des policiers contre les minorités, et les groupes nationalistes blancs sont justement deux exemples de racisme contre lequel Gorman proteste en lisant son poème devant le pays entier pour lui dire qu’il faut travailler pour la “just-ice”.

         Les deux poètes utilisent des images de la nature et des descriptions dramatiques pour renforcer leurs idées et leurs messages. Rimbaud décrit une très belle petite vallée, vibrante de couleurs, avec des rayons qui passent à travers les arbres, et une rivière chantante. Puis, il nous choque avec l’image d’un jeune soldat dont on comprend, tout à la fin, qu’il a  “deux trous rouges” au côté droit, créant ainsi un contraste entre son immobilité (il ne respire plus) et l’agitation du val.

        Gorman aussi utilise des images frappantes pour décrire la violence du pays- elle décrit l’histoire d’inegalite dans les Etats-Unis comme la “never-ending shade”, et puis elle dit que “the dawn” de la justice “is ours before we knew it”. Elle a dit aux Américains que bientôt, nous pouvons créer un grand changement. Ces images dramatiques créent une émotion forte chez les gens qui lisent les poèmes, et on a envie de faire les changements que Gorman et Rimbaud demandent ou suggèrent.

        Là est la beauté de la poésie, et sa force comme outil politique: avec seulement des mots, ces poètes peuvent inspirer des émotions fortes. Ils peuvent aussi inspirer des changements politiques ou sociaux sans violence physique: les poèmes sont publiés, on les lit, on en discute, on adhère à leurs idées, et on travaille aux améliorations qu’ils proposent. De cette façon, Rimbaud et Gorman combattent les problèmes de nos sociétés.