Nous sommes le 20 mai 1885 et la légende littéraire, Victor Hugo, sait qu’il va mourir. Il a du mal à respirer et chaque nuit il souffre plus que la précédente. Sur la fin, le poète exprime sa lutte dans un alexandrin que Le Petit Journal publiera le 23 mai : “En moi c’est le combat du jour et de la nuit”. La France sait autant qu’Hugo qu’il va mourir.
Bien qu’il n’y ait plus d’espoir, personne n’est prêt à perdre le poète. Et personne n’est prêt deux jours plus tard, le 22 mai 1885, quand Victor Hugo meurt. Le chagrin du peuple est immense. Quand il meurt, les policiers doivent empêcher une foule de six mille personnes d’entrer dans sa maison. Six mille ! Ce nombre énorme est pourtant insignifiant en comparaison aux cinq cent mille personnes qui avaient fêté le 79ème anniversaire d’Hugo en 1881. Assis à une fenêtre, l’écrivain avait regardé les défilés pendant six heures. Pour un tel homme, il faut avoir des funérailles auxquelles toute la France puisse assister et pleurer.
Je donne cinquante mille francs aux pauvres. Je désire être porté au cimetière dans leur corbillard.
Ces phrases sont les volontés de Hugo, écrites dans son testament deux ans plus tôt. Il exprime une demande modeste, d’être porté dans le corbillard du pauvre. Quand il meurt, son désir est respecté. Ce corbillard très simple fera partie de la plus grande cérémonie funéraire de l’histoire de France. La cérémonie commence le 1er juin après une semaine tumultueuse. Chaque décision concernant la cérémonie est controversée. Le gouvernement a peur qu’il y ait une révolte mais la journée se passe finalement sans problème. Le corbillard passe à l’Arc de Triomphe, sur la rive Gauche, puis arrive au Panthéon. Deux millions de personnes assistent aux funérailles ! Il n’y a plus eu de funérailles comparables en France depuis.
Aimer, c’est agir
Hugo a écrit ces mots trois jours avant sa mort. Ils l’avaient accompagné toute sa vie. Dans les arts et les actes, il a incarné les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité. Le grand succès des funérailles témoigne de l’amour et du respect du peuple envers lui. Heureusement, toute la France a eu l’occasion de célébrer son héros. On peut néanmoins se demander : aurait-il voulu qu’une telle cérémonie ait lieu ? De plusieurs façons, le gouvernement a ignoré les idéaux de l’homme qui a demandé un corbillard modeste. Les funérailles sont devenues un spectacle d’État. Il a par exemple été enterré au Panthéon alors que beaucoup voulaient qu’il soit enterré au Père Lachaise, pour des raisons symboliques et parce que l’entrée y était gratuite. Malgré des critiques valides, on peut se réjouir que les idéaux d’Hugo soient toujours inscrits dans les œuvres que nous apprécions aujourd’hui.
Sources:
https://www.history.com/news/which-famous-figure-had-the-biggest-public-funeral
https://internationalsection.edublogs.org/files/2021/01/The-National-Funeral-of-Victor-Hugoa.pdf
https://h-france.net/fffh/maybe-missed/victor-hugos-funeral-as-historical-fiction/
https://www.apollo-magazine.com/victor-hugo-liberty-at-the-pantheon/
https://cdnc.ucr.edu/?a=d&d=DAC18850603.2.54&e=——-en–20–1–txt-txIN——–1
https://isreview.org/issue/89/enduring-relevance-victor-hugo/index.html
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k608676z